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Bâtir la Suisse, Jean-Pascal Delamuraz

6 février 2018
David Glaser
notreHistoire

Bâtisseur de la Suisse, il le fut! Engagé, jusqu'au bout de sa vie, dans des batailles comme celle de l'adhésion (refusée) de notre pays à l'Union européenne. Une bataille perdue, mais Dieu que cette bataille fut belle pour ceux qui en ont été les témoins. Après tout, peu importe si elles furent gagnées ou perdues ces batailles, car on en reparle encore aujourd'hui. Et tout sportif de haut niveau pourrait vous le dire, il y a des défaites dont on se souvient plus que des victoires. C'est notre quatrième et avant-dernier tome de la série "Les Bâtisseurs de la Suisse", après Henry Dunant et les généraux Henri Guisan et Guillaume Henri Dufour et avant un spécial "cinéma" avec Ursula Andress.

Jean-Pascal Delamuraz a mis sa rage de convaincre au service de ses concitoyens dans de multiples dossiers, dont celui de l'Europe. Il est mort en 1998 et les Romands lui sont redevables à jamais, les Vaudois peut-être encore un peu plus, lui le natif de Paudex sur le bord du lac Léman devenu d'homme d'état de carrure internationale.

L'homme, aussi respecté par les siens que vilipendé par des ennemis d'un jour (souvenez vous d'une autre bagarre verbale, perdue contre le Congrès juif mondial), fut plutôt un être doté d'esprit et toujours enclin à plaisanter, comme nous le verrons et l'entendrons dans les documents vidéo retrouvés avec l'aide de nos collègues de la RTS.

La maison natale de la famille, un garage en dessous d'un appartement situé sur la Route de la Bordinette à Paudex dans le canton de Vaud (photo Robert Horvay)

Et voici la photo de la même bâtisse il y a quelques décennies. Notez que les carreaux ressemblent à ceux posés à l'origine. (crédit photo inconnu)

L'homme fut un fervent défenseur d'un respect de la zone urbaine lausannoise et de ses habitants. En 1973, il est conseiller municipal lausannois et il explique au journaliste d'Un jour une heure les enjeux de la sauvegarde des quais d'Ouchy. Avec l'aide de Franz Weber, les Vaudois ont refusé le contournement de l'autoroute à la Perraudettaz qui devait couper la ville en deux et suivre les bords du lac.

En 1992, il a mis toute sa force dans la campagne pour l'entrée de la Suisse dans l'Espace Economique Européen. Le radical vaudois est devenu, avec le socialiste René Felber, le promoteur d'une Suisse ouverte, prête à franchir le premier pas vers une adhésion à la Communauté.

Durant cette campagne électorale difficile, l'équipe de Temps Présent a suivi le chef du Département de l'Economie publique pour réaliser le portrait de cet européen convaincu. Il s'est fracassé face à un peuple qui a posteriori avait peut-être été visionnaire, l'Histoire le dira. Les anti-européens convaincus l'ont d'ailleurs qualifié de "traître" à la patrie, lui qui s'est battu pour l'union des différentes communautés linguistiques de Suisse pendant la campagne, rappelant qu'il s'était placé sur le chemin des extrémismes suisses de toutes sortes, combattant "les idées nauséeuses" de James Schwarzenbach qu'illustre l'initiative populaire contre l'emprise étrangère, rejetée par le peuple le 7 juin 1970. Il a été suivi par les journalistes Pierre Pascal Rossi et Jacob Berger.

Décollage cantonal et national

Delamuraz réussit au niveau local. Il réussit au niveau cantonal. Son passage à la ville de Lausanne a été remarqué. Il sera syndic en 1974 (tout en siégeant au Conseil national (de 1975 à 1979) jusqu'en 1980. Sa présence au Conseil d'état vaudois de 81 à 83 va être courte. Il prend en charge le dicastère de l'agriculture, de l'industrie et du commerce pendant ces deux années. Dans le milieu des années 1980, la carrière de Delamuraz va décoller à un niveau national et donc continental.

Jean-Pascal Delamuraz invité de la commune de Bellevue pour une réunion de la chambre d'agriculture à la fin des années 80 (photo Mairie de Bellevue)

On a parlé des défaites de Delamuraz, dont celle de 1992, on peut aussi parler d'un de ses nombreux succès de la fin de son parcours avec une ratification de l'adhésion à l'OMC en 1994. L'homme politique sera donc au cœur des réformes de la politique agricole.

Fin 1996, retour à la présidence du Conseil fédéral après avoir déjà occupé le même poste en 1989. Sa fin de parcours politique sera entaché d'un scandale helvético-américain. Il demande pardon au président du World Jewish Congress Edgar Bronfman après avoir parlé de "chantage" dans l'affaire des fonds juifs en déshérence. Le litige porte sur le comportement décrié des grandes banques suisses.

La démission

Le 31 mars 1998, le Conseiller fédéral décide de se retirer de la fonction suprême. Après 14 ans passées au gouvernement, il annonce avec son style inimitable, teinté d'humour, sa décision, laissant la place à un autre Romand: Pascal Couchepin.

Reportage de l'émission Vaud région, aux commentaires Pierre-François Chatton.

Photo de Robert Ducret et Jean-Pascal Delamuraz (photo Olivier Dottrens)

Le radical humaniste aimait "la vie, les femmes et les gens" selon le journaliste André Beaud, lors des Journées cinématographiques de Soleure, qui a rédigé la trame du film de Daniel Wyss.

La santé, une question importante chez Jean-Pascal Delamuraz. Elle a décliné dans les années 90. Alors qu'en 1992, il souffrait d'une insuffisance cardiaque, en décembre 1995, on lui pose une valve aortique artificielle. En 1997, on lui retire une tumeur du foie. En mars 1998, la maladie a le dessus sur lui. Après avoir démissionné, il luttera quelques mois avant de mourir le 4 octobre 1998.

On termine de dossier des "Bâtisseurs de la Suisse" avec une photo du héros d'Ouchy, à l'époque où le petit travail de décoration naturelle des oiseaux n'avait pas encore été nettoyé malheureusement, le 25 juillet 2012. (photo d'Anne-Marie Martin Zürcher)

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