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F. Liszt, Hunnenschlacht, P. Segond, OSR, E. Ansermet, 1959

18 avril 1959
DECCA
René Gagnaux

Franz LISZT, «Hunnenschlacht», «La Bataille des Huns», poème symphonique No 11, S 105, Pierre SEGOND, orgue, Orchestre de la Suisse Romande, Ernest ANSERMET, disque LONDON STS 15475, 18-21 avril 1959, Victoria-Hall de Genève
Wilhelm von Kaulbach (1805-1874), peintre allemand et directeur de l'Académie des Beaux-Arts de Munich de 1849 à son décès, fit la connaissance de Franz Liszt en 1843, les deux se lièrent d'amitié; Kaulbach peint ensuite deux portraits du compositeur. Liszt - estimant beaucoup l'oeuvre de Kaulbach - écrit à la princesse Carolyne, en juillet 1855:

"[...] Pour ce qui est de Kaulbach, c'est une autre paire de manches, et je crois bien qu'il est véritablement quelqu'un. Dites-lui bien que j'ai toujours eu ce sentiment de lui, et que j'attache un très grand prix à son amitié. Quand je serai quitte de mon Dante, je verrai si je ne pourrais pas composer un de ses tableaux, La Bataille des Huns, par exemple, ou quelque autre plus nouveau, ce qui me conviendrait encore davantage; car j'imagine que son talent a beaucoup grandi ces dernières années! Je lui en parlerai quand nous nous reverrons, et que vous m'aurez un peu mis au fait de ses peintures de Berlin. [...]" lettre de Franz Liszt à la princesse Carolyne du samedi 21 juillet 1855, voir par exemple le fichier pdf disponible sur cette page du site archive.org, en page 231.
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«Die Hunnenschlacht», tableau de Wilhelm von Kaulbach se trouvant actuellement dans la nouvelle Pinakothek de MünichCe tableau de Wilhelm von Kaulbach, peint vers 1850, est inspiré par la bataille des champs Catalauniques en 451, entre les armées chrétiennes et les Huns, conduits par Attila. Il dépeint la légende selon laquelle les esprits des guerriers morts au combat s'envolent vers le Ciel et continuent la bataille dans les airs pendant trois jours et trois nuits.

Dans une autre lettre du 24 juillet 1855 Franz Liszt écrit:

"[...] Je suis ravi que Kaulbach veuille faire son portrait, et lui ferai une Hunnenschlacht en échange, qui ne sera pas non plus piquée des vers! Il y aura très naturellement un long effet de pianissimo à employer, et par lequel il faudra terminer - pour laisser l'auditeur fixé sur le combat dans les airs, comme terrifié et ébloui par ces ombres insatiables de combat! - Et moi aussi je me sens parfois Hun, jusqu'à la moelle des os.[...]"

Finalement, Liszt choisit pourtant de ne pas terminer l'oeuvre de cette façon.

Comme toujours, il est exigeant à propos de l'interprétation de son poème symphonique et accompagne la première page de la partition d'une note «Pour les chefs d'orchestre: la couleur d'ensemble doit être dès le début rendue très sombre, et tous les instruments doivent sonner de façon fantomatique.»

Dans la préface de la partition, évoquant le tableau de Kaulbach, il précise:

"[...] il nous sembla que sa pensée se laisserait transporter en musique, cet art pouvant reproduire l'impression des deux lumières surnaturelles et contrastantes, par deux motifs, dont l'un représente la furie des passions barbares qui poussaient les Huns à la dévastation de tant de pays, au carnage de tant de populations; dont l'autre porte en lui les forces sereines, les vertus irradiantes de l'idée chrétienne. Cette idée n'est-elle pas comme incarnée dans l'antique chant grégorien: Crux fidelis? [...]"

La mélodie de cet hymne est jouée par l'orgue dans une section marquée Lento, et Liszt en cite les paroles en bas de page:

"[...] Crux fidelis, inter omnes arbor una nobilis: nulla silva talem profert fronde, flore, germine. Dulce lignum, dulces clavos, dulce pondus sustinet. [...]"
[Croix fidèle, arbre noble entre tous. Aucune forêt n'a jamais porté un tel feuillage, de telles fleurs, un tel fruit. Doux bois, qui avec de doux clous portes un doux fardeau.]

Il conclut la préface ainsi:

"[...] Plus le tumulte de la bataille devenait assourdissant, plus ce chant grandissait en force et en puissance. Les deux thèmes se rapprochant toujours, finirent par se toucher, s'étreindre, lutter corps à corps, comme deux géants, jusqu'à ce que celui qui s'identifie avec le vrai divin, la charité universelle, le progrès dans l'humanité, l'espérance transmondaine, fût victorieux et répandit sur toutes choses son jour radieux, transfigurant, éternel![...]"

Voir au bas de cette page pour la préface complète.

Première audition en répétition: 12 octobre 1857, Weimar.
Première audition en concert: 29 décembre 1857, Weimar, sous la direction du compositeur.

L'oeuvre fut publiée en 1861 comme poème symphonique No 11 (Leipzig: Breitkopf und Härtel).
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<a href=""></a><a href=""></a>STS 15475, extrait verso pochette

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Ernest ANSERMET dirige ici l'Orchestre de la Suisse Romande, avec Pierre SEGOND à l'orgue, un enregistrement fait par DECCA du 18 au 21 avril 1959 dans le Victoria Hall de Genève, en mono (Eng: Gil Went) et en stéréo (Eng: Roy Wallace). Il faut souligner qu'à cette époque les enregistrements mono et stéréo étaient certes faits dans les mêmes sessions, mais par des ingénieurs du son différents. La comparaison des deux enregistrements permet donc de se faire une bonne image de la qualité stéréo de cette époque.
La première parution date de mai 1960 sur le disque DECCA LXT 5565 resp. DECCA SXL 2195 et de septembre 1960 sur le disque LONDON CM 9246 resp. de mai 1960 sur le disque LONDON CS 6177, couplé avec les Tableaux d'une exposition de Modest Mussorgski, orchestration de Maurice Ravel, également par l'OSR avec Ernest Ansermet (ces données proviennent de la discographie Decca de Philip Stuart).

L'enregistrement stéréo présenté ici vient de la réédition sur le disque LONDON STS 15475.

Franz Liszt, «Hunnenschlacht», «La Bataille des Huns», poème symphonique No 11, S 105, Pierre Segond, orgue, Orchestre de la Suisse Romande, Ernest Ansermet, disque LONDON STS 15475, 18-21 avril 1959, Victoria-Hall de Genève (Tempestoso. Allegro non troppo - Più mosso (Allegro energico assai) - Alla breve - Immer stürmischer - Maestoso assai (Andante) - Lento - Nicht schleppend, aber sehr ruhig - Allegro (Alla breve) - Stretto 14:38)

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*LONDON STS 15475 -> WAV -> léger à moyen DeClick avec ClickRepair, des réparations manuelles -> MP3 320 kbps, restauration effectuée par moi-même: l'enregistrement est donc de ce fait libre de droits d'autres personnes ou sociétés, le disque étant paru pour la première fois il y a plus de 50 ans (droit voisin), et le compositeur et autres ayants droits décédés il y a plus de 70 ans (droit d'auteur).

Pour le fichier de cet enregistrement au format FLAC - donc comprimé sans pertes - voir cette page de mon site.*

Ci-dessous: Franz Liszt, S 105, Préface de la partition de l'édition Leipzig Breitkopf Härtel, 1910

Liszt S 105 Preface partition Leipzig Breitkopf Haertel 1910Franz Liszt, S 105, Préface de la partition de l'édition Leipzig Breitkopf Härtel, 1910

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  • Martine Desarzens

    Cher René, Jamais ne n'aurais découvert cette oeuvre si bien dirigée par Ernest Ansermet sans votre document et surtout votre magnifique explication.Un immense merci. Amicalement. Martine Desarzens

  • René Gagnaux

    Merci pour votre commentaire, chère Martine. Sans connaître l'histoire, les circonstances de la composition de cette oeuvre, il est difficile de l'apprécier. Heureusement que Franz Liszt a laissé une abondante correspondance, qui permet de mieux comprendre et de mieux apprécier ses oeuvres!

René Gagnaux
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4 août 2016
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