Gustave Courbet en Suisse

10 juillet 2010
photo et texte de Marianne Carron
Marianne Carron

L'Helvétia*. Bronze de Gustave Courbet offert par l'artiste aux commune de* La Tour-de-Peilz et de Martigny, en remerciement à la Suisse pour son accueil. Le buste à l'origine était orné d'un bonnet phrygien et d'une croix fédérale, le sens de l'oeuvre pouvant induire à confusion elle sera, à la demande de la municipalité de La Tour-de-Peilz, légèrement modifiée et renommée. Une étoile remplacera la croix Suisse et l'oeuvre deviendra "Liberté". Photo: Carron Marianne

Artiste français, né le 10 juin 1819, à Ornans près de Besançon, Gustave Courbet est un des chefs de file du courant réaliste. Ses paysages empreints de solitude sont presque des autobiographies, mais ses nus par leur densité et leur naturel semblent presque top présent ; ce réalisme en peinture fit scandale. On lui doit en particulier le tableau "l'Origine du monde".

Engagé dans les mouvements politiques de son temps, il a été l'un des élus de la Commune de 1871 accusés d'avoir fait renverser la colonne Vendôme. Condamné à la faire relever à ses frais, l'artiste ruiné et couvert d'une dette phénoménale qu'il ne pourra jamais rembourser, quitte la France en 1873 après 6 mois de prison.

Courbet connaissait déjà un peu la Suisse avant de la choisir pour s'y exiler. Il passe quelques semaines à explorer le Jura ; Le Locle, La Chaux-de-Fonds, Neuchâtel, Genève et le Valais avant de se fixer au bord du lac Léman à la Tour-de-Peilz.

Genève, un bateau-lavoir sur le Rhône et l'ìle Rousseau. Photo Collection J.C. Curtet

Courbet s'installe à La Tour-de-Peilz, à Bon Port; une maison qu'il partage avec son collaborateur le peintre suisse Cherubino Pata, un artiste fortement influencé par son style. C'est là qu'il vivra le plus souvent jusqu'à son décès le 31 décembre 1877.

Ses faits et gestes sont surveillés par des espions infiltrés jusque dans la colonie des proscrits de la Commune de Paris. Ils surveillent ses contacts et ses fréquents déplacements, si bien qu'il nous est possible de connaître sa vie en Suisse: très actif, il peint, sculpte, expose, participe à de nombreuses manifestations aussi bien artistiques, politiques que populaires, il soutien sinistrés et exilés en donnant ses tableaux pour des tombolas.

Courbet se rends à Fleurier, Genève, Nyon ( où il payera son séjour à l'Auberge du Soleil en leur peignant une enseigne), Veytaux où il peindra le Château de Chillon, au château de Blonay, Clarens, Fribourg, en Gruyère, Interlaken, Lucerne, Martigny, Loèche-les-Bains, Zurich,…

Les moyens de transports dont il a pu faire usage pour ses déplacements, sont, outre les trains en pleine expansion et les bateaux à vapeur, les traditionnelles diligences, comme celle de Vevey-Blonay. Collection Blonay en images.

Voici le Château de Chillon vers 1870 et ICI le tableau de Courbet, dont le point de vue partant de la plage, permet d'escamoter toute trace de modernité. Photo Collection de Yves Biselx.

Gustave Courbet s'adapte rapidement au pays - bien qu'il scandalise parfois la population - et pris ses habitudes à la table ronde du Café du Centre, dont le patron Jules Budry pour lui venir en aide lors d'une visite du fisc français dissimulera dans un tonneau 140 de ses tableaux.

En 1872, la demande de tableaux est telle qu'il ne peut suivre et doit engager des aides pour ses paysages, ce dont il ne fait pas mystère. En 1873 il expose 34 tableaux à Vienne en marge de l'Exposition Universelle; il est contacté par le peintre James Whistler pour exposer à Londres, et il expose régulièrement à Boston depuis 1866. Si sa production est de qualité irrégulière, ce qui lui était courant, et qu'il brûlera à la fin de sa vie 60 tableaux qu'il juge insuffisants, il n'hésite pas à signer des œuvres de ses élèves, et ne se plaint pas qu'on l'imite, ce qui entraîne à confusion. Durant cette période en Suisse, et bien que les circonstances ne soient pas trop favorable, il réalise quelques-uns de ses chef-d'œuvres, dont sa dernière huile, restée inachevée : Les Dents du Midi.

Il reçoit la fréquente visite de peintres suisses comme Auguste Baud-Bovy, François Bocion, François Furet, qui viennent peindre en sa compagnie et présente ses œuvres dans les mêmes expositions que Hodler.

Courbet séjourne plusieurs mois dans les environs de Martigny, notamment au moulin de Saillon où il réalise en 1873 - entre autres paysages - une oeuvre restée longtemps mystérieuse par son aspect surréaliste à la Arcimboldo : la Grotte du Géant ( Photo Mariecisa. Wikipédia) en fait, une formation rocheuse naturelle de la gorge de la Salentse.

Il meurt à 58 ans, d'une hydropisie qu'il négligeait de soigner. Quelques mois avant sa mort, Courbet fit don du buste présenté en haut de l'article au président de Martigny, Alexis Gay.

Et de celui ci-dessous, à la commune de la Tour de Peilz.

Fontaine de la Place du Temple. Photo de Sylvie Bazzanella.

A lire aussi l'article :

«Gustave Courbet sur les sentiers de l'exil», par Luc Debraine

Merci à tous les contributeurs de cet article.

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